Serres Olivier De.

Serres Olivier De

Olivier de Serres, né à Villeneuve-de-Berg en 1539 et mort le 12 juillet 1619 au même endroit, est un agronome françaisprotestant actif et auteur d'un vaste traité, le Théâtre d’Agriculture et mesnage des champs, qui connut 19 rééditions de 1600 à 1675. Il étudia de manière scientifique les techniques agricoles et en rechercha l’amélioration par l'expérimentation. De ce point de vue, il est généralement considéré comme le père de l’agronomie française, bien que les termes « agronome » et « agronomie » datent de la seconde moitié du XVIIIe siècle ; on parle alors de « mesnager des champs » (gestionnaire de terres agricoles), selon les termes de son époque.

Olivier de Serres

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/8/85/Olivier_de_Serres.jpg/260px-Olivier_de_Serres.jpg

Biographie

Naissance

1539
Villeneuve-de-Berg

Décès

2 juillet 1619 ou 12 juillet 1619
Villeneuve-de-Berg

Nationalité

 Royaume de France

Activités

Agronomeécrivain

Œuvres principales

Château de Joviac

Biographie

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/3/37/Serres.svg/150px-Serres.svg.png

Blason.

La famille de Serres est originaire du Vivarais, et fait fortune dans le commerce du drap. Jacques de Serres eut deux filles, Claude et Delphine, puis trois garçons, Olivier, Jean et Raymond. La famille est protestante, de façon militante. Jean fut pasteur puis historiographe d'Henri IV, Olivier sera diacre de l'église réformée de Villeneuve-de-Berg.

Olivier de Serres n'a que sept ans à la mort de son père. La position de sa famille lui permet de bénéficier des meilleurs enseignements et d’un précepteur privé. Il étudie le grec et le latin, peut-être à Valence. Il complète sa formation par de nombreux voyages en France, Italie, Allemagne et Suisse, ce qui lui permettra de donner des exemples toujours précis et variés.

Seigneur du Pradel

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/e/e3/Olivier_de_Serres_m%C3%A9daille_avers.jpg/220px-Olivier_de_Serres_m%C3%A9daille_avers.jpg

Médaille portant le portrait d'Olivier de Serres par Alphonse Desaide.

En 1557, Olivier de Serres acquiert les moulins du Pradel à un propriétaire désargenté qui lui cède pour 3 828 livres le reste de la propriété, soit une centaine d'hectares et une maison fortifiée, l'année suivante. À 19 ans, Olivier de Serres devient « seigneur du Pradel » et porte les armes suivantes « D'argent au chevron d'azur, chargé de trois étoiles d'or, accompagné de trois trèfles de sinople. Couronne de marquis. Supporté par deux aigles »2. La devise Cuncta in tempore qui figure sur la 15e édition n'est pas celle d'Olivier de Serres mais c'est celle de son éditeur, Jean Berthelin à Rouen.

Le 11 juin 1559, Olivier de Serres épouse Marguerite d'Arcons (ou d'Harcours), fille d'un licencié en droit. Le couple aura sept enfants. L'aîné, Daniel fut docteur en droit et juge à Villeneuve-de-Berg, le second, Gédéon, devint avocat ; le troisième, Pierre fut aussi docteur en droit. Jacques ne fit guère d'études et servit le roi du Piémont. Bonne épousa un clavaire du Roi, Isabeau un bourgeois de Montélimar et Marie un procureur au parlement de Castres.

En 1571, Olivier de Serres achète « la juridiction du Pradel contre cinq sestiers bled froment de rente annuelle » et acquiert ainsi le droit de rendre justice sur ses terres.

Un protestant actif

En 1561, l'église réformée de Berg n'a pas de pasteur et le 4 janvier 1561, à la sortie de l'office, Olivier de Serres est chargé par l'assemblée de se rendre à Genève pour chercher un « fidèle ministre pour les enseigner en la parole de Dieu ». Le pasteur Jacques Beton (ou Béton)2, sans doute Jacques Besson, sa femme et sa fille arrivent le 15 mars 1561 et seront logées au Pradel jusqu'au 15 août. Besson était par ailleurs mathématicien et ingénieur. Olivier de Serres engage quelques dépenses pour habiller le ministre et sa famille, réparer un logement et acheter une corde neuve pour la cloche du temple, dépenses qu'il consigne soigneusement dans son « livre de raison.

En 1562, la France est agitée par des guerres de religion et le 2 mai, les consuls de Villeneuve-les-Berg procèdent devant notaire à la « cancellation », c'est-à-dire à la rupture du contrat par lequel le curé de la paroisse s'était vu confier, par son prédécesseur, l'usage des vases et ornements sacrés de l'église catholique romaine. Les objets (calices, croix, reliquaires et chasubles ornées d'or) sont donc saisis et confiés à Olivier de Serres puis vendus en 1567 pour 380 livres à un orfèvre de Montélimar car personne ne voulait en assurer la garde. La somme fut confiée à Olivier de Serres qui ne la rendit jamais, fort d'un mémoire détaillant les diverses dépenses qu'il avait engagées pour la communauté de Villeneuve-de-Berg. La somme ne fut réclamée qu'après sa mort et sa famille la livra donc au prieur de la ville.

Le 2 mars 1573, il participe à la prise de Villeneuve-de-Berg en aidant le commandant des troupes à entrer dans la ville, comme l'atteste Agrippa d'Aubigné dans son Histoire universelle publiée en 1626. Sa participation dans le massacre d'une trentaine de prêtres catholiques réunis ce jour-là pour un synode diocésain reste incertaine. Le nom d'Olivier de Serres figure cependant sur la liste des notables protestants qui se réunirent la veille de l'attaque pour décider de la somme à verser au traître qui devait ouvrir de l'intérieur les portes de la ville. Le lendemain de l'attaque les mêmes notables devaient se réunir pour savoir ce qu'il fallait faire de la somme promise au feu capitaine Pouchot (ou Ponchot). Un créancier se présenta et fut paye.

En 1628, sa propriété fortifiée, située au Pradel, assiégée par Montmorency, puis Ventadour, où il avait toutes ses plantations expérimentales, fut rasée sur ordre de Richelieu. Son fils Daniel édifia les bâtiments actuels.

L'installation au Pradel

Situé dans une zone de passage, Le Pradel n'est pas un lieu très sûr et la famille d'Olivier de Serres s'est réfugiée dans le village fortifié de Mirabel adossé au plateau basaltique du Coiron. La propriété est mal entretenue, le moulin s'est écroulé et le meunier a disparu ; seuls quatre paysans demeurent encore sur place lorsqu'en août 1578, Olivier de Serres et sa famille décident de s'installer définitivement au Pradel. Il y séjournera pendant quarante ans.

Olivier fait du Pradel une ferme modèle qui sera le théâtre de nombreuses expérimentations pratiques. Il restaure la demeure, nettoie et amende les terres, amène l'eau par un canal d'irrigation d'un kilomètre. Son but est de faire partager son savoir, tant aux paysans pour leur permettre d’obtenir de meilleures récoltes, qu’aux propriétaires pour faire fructifier leurs domaines. On lui doit l’introduction de nombreuses plantes, telles que la garance, le houblon et le maïs. Il fut le premier à travailler à l’extraction du sucre à partir de la betterave, mais sans arriver à un processus rentable.

Les séjours parisiens

Après des études à Lausanne, le frère d'Olivier de Serres, Jean de Serres, devient pasteur de l'église réformée à Nîmes, Montélimar puis Orange et obtient la protection du roi Henri IV dont il devient historiographe. Jean meurt le 19 mai 1598, probablement de la peste contractée à Grenoble, sa femme décédant quelques heures plus tard. Olivier de Serres est nommé tuteur des enfants en partage avec un autre membre de la famille. Afin d'obtenir la somme d'argent promise par le Roi dans son ordonnance du 4 juin 1597 à leur père, Olivier quitte le Pradel le 16 novembre 1598 et se rend à la cour. Le Roi ne reçoit pas Olivier de Serres mais accepte un tableau de marbre blanc que son frère avait l'intention de lui offrir. Dans l'espoir de rencontrer le monarque, Olivier s'installe à Paris et en profite pour s'occuper de l'édition du livre d'agriculture qu'il a écrit. En février 1599, Jamet Mettayer publie un chapitre de l'ouvrage sous le titre « La cueillette de la soye par la nourriture des vers qui la font ; échantillon du Théâtre d'Agriculture d'Olivier de Serres, seigneur du Pradel ». Le 1er juillet 1600, le Théâtre d'agriculture paraît dans son intégralité (in-folio 1024 pages).

Olivier retourne en Vivarais et reçoit le 27 septembre 1600 un émissaire du roi. Celui-ci souhaite qu'on lui adresse à Paris, 15 000 à 20 000 mûriers pour introduire la soie « jusqu'au cœur du royaume ».

Quelques mois plus tard, Olivier de Serres fait un deuxième voyage à Paris et prépare la deuxième édition du Théâtre d'Agriculture qui paraît en 1603. Cependant il ne parvient toujours pas à obtenir l'argent promis pour les enfants de son frère Jean.

En 1604, lors de son troisième et dernier voyage, il obtient enfin satisfaction, soit quatre mille livres payables par quartiers, et quitte définitivement Paris le 19 mars 16052, alors que son fils Gédéon reste dans la capitale.

Reconnu et respecté par ses pairs, il est ami de Claude Mollet (1563-1650), le jardinier d’Henri IV qui réalisa les jardins de Saint-Germain-en-Laye, de Fontainebleau, des Tuileries et de Blois.

Un fin gestionnaire

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/a/ae/Olivier_de_Serres_%C3%A0_Villeneuve_de_Berg.JPG/220px-Olivier_de_Serres_%C3%A0_Villeneuve_de_Berg.JPG

Bronze pédestre d'Olivier de Serres à Villeneuve-de-Berg (statue de Hébert inaugurée le 29 août 1858).

Olivier loge son neveu orphelin au Pradel, le fait instruire par le ministre du culte, puis l'envoie à Orange pour continuer ses études au collège. Son livre de raison indique qu'il a calculé le temps de séjour de celui-ci soit 6 ans, 9 mois et 22 jours et qu'il a estimé la dépense correspondante à 8 livres le mois soit 592 livres au total. Il n'oublie pas de consigner les 40 sols qu'il a donnés à un muletier pour convoyer l'enfant jusqu'à Orange. Cela se terminera par un procès concernant le compte de tutelle dont le jugement, rendu à Orange le 19 décembre 1618, n'est pas connu. Il devra encore à plusieurs reprises répondre devant les tribunaux. Une autre action en justice est intentée par l'une de ses belles-filles, la veuve de Gédéon, qui réclame l'argent qu'Olivier avait promis à son fils et qu'il lui versait par fraction chaque année.

Vers la fin de sa vie, alors qu'il ne peut plus exploiter le domaine, il prend un fermier et rédige un contrat avec de nombreux détails tels que : « Nourrira quinze poules et pour icelles me baillera quinze œufs chaque semaine. »

En 1612, Olivier de Serres rédige son testament dans lequel il lègue 2 000 livres à Pierre et autant à Jacques. Il rappelle qu'il a déjà doté chacune de ses filles à l'occasion de leur mariage et leur donne à chacune 20 livres en ajoutant « moyennant ce, veut et entend, qu'elles soient comptantes sans autre chose pouvoir demander ni avoir sur ses (mes) biens ». Il laisse 5 livres à chacun des trois enfants de son fils Gédéon et de même « entend qu'ils soient comptans ». Olivier de Serres laisse la moitié du Pradel à son fils Daniel et l'autre moitié à sa femme, Marguerite d'Arcons, qui disparaît avant lui. Par modification testamentaire, la totalité du Pradel échoit ainsi à Daniel.

À son décès, le 2 juillet 1619, les créanciers d'Olivier de Serres sont appelés à se manifester. Son fils Daniel accepte l'héritage sous bénéfice d'inventaire ce qui laisse supposer une relative fragilité financière du domaine, en dépit des connaissances agronomiques du propriétaire. Finalement, le Pradel peut être conservé dans la famille et le domaine ne connaîtra pas une fin comparable à celui d'autres agronomes expérimentateurs tels Césaire Nivière ou Mathieu de Dombasle, même s'il n'aura pas permis à son propriétaire de s'enrichir notablement.

Œuvres

Les éditions et rééditions du Théâtre d'Agriculture et mesnage des champs

Après la publication d'un chapitre en février 1599, Le Théâtre d’agriculture et mesnage des champs est publié le 1er juillet 1600 dans son intégralité (in-folio 1024 pages) à Paris par Jamet Mettayer. En 1564 avait paru L’Agriculture et Maison Rustique de Charles Estienne, et auparavant encore son Praedium rusticum en 1554, que le jésuite Vanière de Béziers reprendra bien plus tard.

Le Théâtre a fait l'objet de huit éditions ou réimpressions du vivant de l'auteur et on compte 19 rééditions de l'ouvrage de 1600 à 1675, dont plusieurs à Genève qui sont autant de témoignages de l'origine protestante d'Olivier de Serres. À la suite de la révocation de l'Édit de Nantes, il ne sera plus réédité pendant près d'un siècle et il faudra attendre le Directoire pour que, sous l'impulsion de Pierre Bénézech et surtout de François de Neufchâteau, l'ouvrage soit enfin réédité. La publication reprend à Paris à partir de 1802. L'édition de 1804 est réalisée grâce au concours de la Société d'agriculture et François de Neufchâteau rédige la préface et la biographie de l'auteur ; figurent également de nombreuses notes de la part des agronomes de l'époque (Jean-Antoine ChaptalJacques Philippe Martin CelsLouis CotteNicolas DeyeuxLouis d'UssieuxJean-Baptiste HuzardCharles Philibert de LasteyrieGuillaume-Antoine OlivierAntoine ParmentierHenri-Alexandre Tessier et Victor Yvart), redonnant ainsi ses lettres de noblesse à Olivier de Serres. L'abbé Grégoire y ajoute un État de l'agriculture en Europe au seizième siècle.

Ainsi, 200 ans après la parution du Théâtre d'Olivier de Serres, il avait suffi de reprendre quelques passages pour représenter les connaissances agronomiques du début du XIXe siècle, ce qui montre qu'elles avaient finalement peu progressé tout en confirmant l'extraordinaire durée de l'influence de l'auteur sur la pensée agronomique française.

Date de dernière mise à jour : 27/08/2023

  • Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !

Ajouter un commentaire

Anti-spam