Agriculture biologique
L'agriculture biologique est une méthode de production agricole qui vise à respecter les systèmes et cycles naturels, maintenir et améliorer l’état du sol, de l’eau et de l’air, la santé des végétaux et des animaux, ainsi que l’équilibre entre ceux-ci.
À cette fin, elle exclut le recours à la plupart des produits chimiques de synthèse, utilisés notamment par l'agriculture industrielle et intensive depuis le début du XXe siècle, les organismes génétiquement modifiés par transgénèse, et la conservation des cultures par irradiation. La fertilisation du sol et la protection des plantes doivent donc être assurées en privilégiant au maximum l'utilisation d'engrais et de pesticides issus ou dérivés de substances naturelles ou la lutte biologique. Les pratiques d'agriculture biologique sont soumises à des normes contraignantes permettant la labellisation des produits et un prix de vente généralement plus élevé. Les motivations des agriculteurs et des consommateurs peuvent être de meilleurs revenus, une meilleure santé au travail, la protection de l'environnement ou des produits perçus comme plus sains. L'élevage d'animaux des fermes biologiques doit respecter des conditions de vie plus respectueuses du bien-être animal que l'agriculture traditionnelle.
Définie depuis les années 1920, l'agriculture biologique est organisée à l'échelle mondiale depuis 1972 (International Fédération of Organic Agriculture Movements – IFOAM) et reconnue depuis 1999 dans le Codex Alimentarius, un programme commun de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). L'agriculture biologique est une des formes d'agriculture durable ; l'appellation « biologique », ou son abréviation « bio », est protégée légalement et implique une certification. Plusieurs labels internationaux de reconnaissance de ce type d'agriculture ont été définis.
Depuis 1990, le marché des aliments et autres produits biologiques a augmenté rapidement, atteignant 63 milliards de dollars dans le monde en 2012. Cette demande s'est accompagnée d'une augmentation de la surface des terres agricoles destinées à l'agriculture biologique, qui s'est accrue de 8,9 % par an en moyenne entre 2001 et 2011[6]. Dans le monde, plus de 37,2 millions d'hectares étaient consacrés à l'agriculture biologique à la fin de l'année 2011, soit 0,9 % des terres agricoles des 162 pays pris en compte dans le calcul. En 2015, l'agriculture biologique occupait 6,2 % de la superficie agricole utilisée de l'Union européenne.
Définitions
L'appellation en français « agriculture biologique » est apparue vers 1950 comme équivalent de l'expression anglaise organic farming, apparue une dizaine d'années plus tôt. Cette appellation fait référence au fait qu'en agriculture biologique la fertilisation du sol et la protection contre les parasites sont assurées par des processus biologiques, tandis que l'agriculture conventionnelle a recours aux intrants de synthèse (engrais, pesticides, hormones).
Plusieurs définitions assez voisines ont été proposées :
« L'agriculture biologique est un système de production qui maintient la santé des sols, des écosystèmes et des personnes. Elle s'appuie sur des processus écologiques, sur la biodiversité et sur des cycles adaptés aux conditions locales, plutôt que sur l'utilisation d'intrants ayant des effets néfastes. L'agriculture biologique allie la tradition, l'innovation et la science au bénéfice de l'environnement commun […] »
— International Federation of Organic Agriculture Movements.
« La production biologique est un système global de gestion agricole et de production alimentaire qui allie les meilleures pratiques environnementales, un haut degré de biodiversité, la préservation des ressources naturelles, l'application de normes élevées en matière de bien-être animal et une méthode de production respectant la préférence de certains consommateurs à l'égard des produits obtenus grâce à des substances et des procédés naturels. »
— Règlement (CE) no 834/2007 du Conseil de l'Union européenne.
« La production biologique est un système global de gestion agricole et de production alimentaire qui allie les meilleures pratiques en matière d'environnement et d'action pour le climat, un degré élevé de biodiversité, la préservation des ressources naturelles et l'application de normes élevées en matière de bien-être animal et des normes de production élevées répondant à la demande exprimée par un nombre croissant de consommateurs désireux de se procurer des produits obtenus grâce à des substances et à des procédés naturels. »
— Règlement (UE) 2018/848 du Parlement européen et du conseil du 30 mai 2018.
Fondements
Le mouvement de l'agriculture biologique s'est constitué en réaction à l'avènement de l'agrochimie, au milieu du XXe siècle, et surtout au développement de l'usage des engrais minéraux issus de la chimie de synthèse dès la fin de la Première Guerre mondiale.
L'apparition de l'agriculture biologique s'accompagne de nombreuses critiques sur l'évolution de la pratique agricole. Sont notamment critiqués :
- L’abandon d'une vision holistique (ou holiste) de la nature et de la croyance en une nature bienveillante ;
- La conception matérialiste de l'agriculture industrielle, qui néglige l'importance de la « vitalité » des aliments produits par un sol vivant ;
- Le rejet des pratiques traditionnelles et du rôle prépondérant de l'humus (notamment pour Albert Howard et Masanobu Fukuoka) ;
- La dégradation des liens sociaux et des libertés paysannes, à la suite des restructurations du XIXe siècle et du développement des grands groupes agro-industriels (Müller) ;
- le développement d'une vision réductionniste du monde et l'instrumentalisation de la nature aux dépens d'une relation plus spirituelle avec celle-ci, et le désenchantement qui accompagne ce rapport au monde (Steiner, Fukuoka) ;
- L’autorité d'une science agronomique confinée au laboratoire et détachée des réalités du terrain (Howard, Fukuoka) ;
- La prédominance des intérêts financiers et commerciaux dans la conception des exploitations agricoles et dans les développements technologiques, généralement aux dépens de la fertilité du sol (Howard, Müller, Fukuoka).
Le rejet de l'utilisation des produits de synthèse dans la production agricole et la volonté de produire des aliments de meilleure qualité sont apparus plus tardivement. Ils constituent à l'heure actuelle les critères principaux pris en compte par les labels d'agriculture biologique.
Histoire
Parmi les fondateurs de l'agriculture biologique, on compte notamment Albert Howard, Raoul Lemaire, Lord Northbourne, Paule Lapicque, Hans Müller (de) et Maria Müller (de), Hans Peter Rusch (de), Rudolf Steiner (et le mouvement Lebensreform) et enfin Masanobu Fukuoka, qui dans les années 1970 développe l'agriculture biologique au Japon.
Émergence du concept
L'agriculture biologique émerge à l'issue d'un processus en trois phases de naissance, d'organisation et de structuration.
Naissance du concept
Dans les années 1920-1930, les pionniers sont, soit des penseurs spirituels et ésotériques, regrettant la disparition progressive de la paysannerie (Jean Giono), soit des agronomes tels que Albert Howard qui commencent à remettre en cause l'introduction de l'industrie dans l'agriculture, base de la société traditionnelle.
Organisation du concept
Dans les années 1940-70 s'organisent des associations soutenant l'agriculture biologique : Soil Association (en) (1946), L'homme et le sol (1949, Henri Prat), l'Association française d'agriculture biologique (AFAB, 1961), l'association Nature et Progrès (1964).
L'agriculture biologique est présente au Salon de l'agriculture pour la première fois en 1970. C'est durant cette période que le concept d'agriculture biologique est véritablement créé en synthétisant les grandes valeurs développées par les théoriciens d'avant-guerre : refus de la chimie, retour à la paysannerie et aux cycles naturels. Viennent s'y greffer les préceptes de solidarité et liberté développés par les mouvements contestataires de l'époque.
Structurations institutionnelles
Les grands acteurs institutionnels et économiques apparaissent à partir de la fin des années 1970.
En France : la Fédération nationale d'agriculture biologique voit le jour en 1978, Biocoop et Ecocert en 1986, et le logo officiel en 1993. Un premier plan de conversion des surfaces agricole est établi par l'Agence Bio en 2001 (il se solde par un échec : l'objectif de 5 % de surface en agriculture biologique en 2007 n'est pas atteint). Un second plan est lancé à la suite du Grenelle de l'environnement en 2007, qui se fixe pour objectif que 6 % de la surface agricole utilisée (SAU) porte le label AB en 2012. En 2019, le pourcentage de SAU en agriculture biologique est de 7,5 %.
Évolution des modèles vers une agriculture biologique plus durable
En dehors du cahier des charges qu'impose la pratique de l'agriculture biologique, certaines pratiques transversales complémentaires émergent en rupture avec le concept technique.
Meilleur respect du sol
Les valeurs de respect du sol par sa compréhension ainsi que le respect de son fonctionnement naturel est observé depuis les pratiques de l'agriculture de conservation (AC) aux valeurs différentes, particulièrement concernant l'usage de pesticides et en particulier du glyphosate, que cette agriculture de conservation s'autorise à l'occasion, mais où, dans son modèle, la réduction voire le non-travail du sol est associé à un couvert permanent et varié.
Le défi pour l'agriculture biologique est de s'inspirer de ces techniques afin de réduire au maximum le travail du sol, d'augmenter la fertilité naturelle du sol et de faire des économies de temps de travail et de carburant tout en maîtrisant les adventices sans recourir au glyphosate.
Cette prise de conscience de la préservation de la fertilité des sols n'est pas seulement technique et financière mais aussi agronomique et environnementale. Elle permet aussi de limiter l'érosion des sols, de mieux maîtriser la perte hydrique des sols et de bénéficier d'un meilleur stockage du carbone, avec en arrière-plan le défi supplémentaire de l'adaptation au changement climatique.
Mises en œuvre des systèmes d'agriculture biologique
« Une ferme biologique, à proprement parler, n'est pas celle qui utilise certaines méthodes et substances et évite d'autres, c'est une ferme dont la structure imite la structure d'un système naturel qui a l'intégrité, l'indépendance et la dépendance bénigne d'un organisme »
— Wendell Berry, The Gift of Good Land.
Selon le scientifique devenu éleveur, Xavier Noulhianne, les méthodes biologiques concernaient essentiellement, jusqu'aux années 1980, la production végétale et elles se différenciaient principalement par les techniques d'amendement du sol. Cet auteur distingue les techniques suivantes :
- La méthode agrobiologique anglaise (Howard) ;
- La méthode biodynamique (Steiner) ;
- La méthode à base de roches siliceuses (Müller) ;
- La méthode à base de lithothamme ou méthode Lemaire-Boucher.
On peut citer aussi d'autres techniques spécifiques, ou empruntées à l'agriculture conventionnelle, qui sont utilisées :
- La lutte biologique et la confusion sexuelle protègent les cultures des parasites, et des insectes ravageurs, par exemple par l'emploi d'insectes entomophages.
- L'utilisation de certains produits phytosanitaires est autorisée en agriculture biologique (cuivre, soufre, pyréthrines, etc.).
- Les cultures associées, en combinant plusieurs espèces végétales sur une même parcelle, limitent la prolifération des parasites et ravageurs ; la technique des trois sœurs est un exemple.
- La permaculture est une méthode de conception qui permet de planifier les cultures, entre autres choses, de manière à exploiter au mieux les conditions climatiques et géographiques locales, et à maximiser les interactions entre les cultures.
- L'agroforesterie intègre les arbres aux exploitations agricoles.
- Les techniques culturales simplifiées limitent le travail du sol ; cette technique est difficile en agriculture biologique car elle augmente les risques de prolifération d'adventices.
- Le semis direct sous couvert permet de restituer au sol les nutriments prélevés, d'entretenir les bactéries permettant leur assimilation par les plantes, et de limiter le développement des adventices. Cette technique issue de l'agriculture de conservation est assez délicate en agriculture biologique à cause de la gestion des adventices, même si le risque est plus faible qu'avec les techniques culturales simplifiées (présence de paillis protecteur, mortalité plus importante des graines non désirées qui restent en surface).
- Le compostage et le paillis permettent de restituer les nutriments prélevés au sol, de limiter les méfaits des intempéries, et d'entretenir le développement de l'humus.
- Les purins qui sont avant tout des fertilisants, mais qui auraient aussi des effets sur les ravageurs.
- La microagriculture biointensive.
- La culture sans labour et l'agriculture naturelle se concentre sur un minimum ou une absence de culture mécanique et de labour pour les cultures de céréales.
Les méthodes d'agriculture biologique combinent la connaissance scientifique de l'écologie et de la technologie moderne avec les pratiques agricoles traditionnelles basées sur des processus biologiques naturels. Les méthodes d'agriculture biologique sont étudiées dans le domaine de l'agroécologie. Alors que l'agriculture conventionnelle utilise des pesticides de synthèse et des engrais de synthèse purifiés solubles dans l'eau, les agriculteurs biologiques sont limités par la réglementation à l'utilisation presque exclusive de pesticides et d'engrais naturels. Les principales méthodes de l'agriculture biologique pour améliorer la fertilité du sol et protéger les cultures comprennent la rotation des cultures, les engrais verts et de compost, la lutte biologique et la culture mécanique. Ces mesures utilisent l'environnement naturel pour améliorer la productivité agricole : des légumineuses sont plantées pour fixer l'azote dans le sol, les organismes auxiliaires sont encouragés, la rotation des cultures permet de confondre les ravageurs et de renouveler le sol, et des matériaux naturels tels que le bicarbonate de potassium et le paillis sont utilisés pour contrôler les maladies et les mauvaises herbes. Des plantes plus rustiques sont générées par la culture sélective des plantes plutôt que par le génie génétique.
Plusieurs des méthodes développées pour l'agriculture biologique ont été utilisées ensuite par l'agriculture conventionnelle. Par exemple, la lutte intégrée est une stratégie qui utilise diverses méthodes biologiques de lutte contre les ravageurs, auxquelles l'agriculture conventionnelle a également parfois recours.
Diversité des cultures
La diversité des cultures est une caractéristique distinctive de l'agriculture biologique. L'agriculture conventionnelle se concentre le plus souvent sur la production intensive d'une culture en un seul endroit, une pratique qui facilite la récolte. Lorsque par ailleurs la même plante est cultivée chaque année, on parle de monoculture. La monoculture est difficilement compatible avec l'agriculture biologique car elle favorise le développement des insectes ravageurs, contre lesquels les méthodes biologiques ne permettent pas de lutter efficacement. La science de l'agroécologie a révélé les avantages de la polyculture (plusieurs cultures dans un même espace), qui est souvent mise en œuvre par l'agriculture biologique. Planter une variété de cultures maraîchères prend en charge un large éventail d'insectes bénéfiques, de micro-organismes du sol et d'autres facteurs qui ajoutent à la santé globale de l'exploitation. La diversité des cultures permet de protéger les espèces en voie d'extinction.
Gestion des sols
L'agriculture biologique repose largement sur la décomposition naturelle de la matière organique, en utilisant des techniques comme engrais verts et compostage, pour remplacer les nutriments extraits du sol par les cultures précédentes. Ce processus biologique, grâce à des micro-organismes tels que les mycorhizes, permet la production naturelle de nutriments dans le sol tout au long de la saison de croissance. L'agriculture biologique utilise une variété de méthodes pour améliorer la fertilité du sol : la rotation des cultures, les cultures de couverture, le travail réduit du sol (agriculture de conservation), et l'application de compost. L'agriculture de conservation (qui n'est pas propre à l'agriculture biologique) permet de réduire l'exposition du sol à l'air, de sorte que moins de carbone est perdu dans l'atmosphère. Cette technique favorise la séquestration du dioxyde de carbone, ce qui permet de réduire l'effet de serre et donc de ralentir le changement climatique.
Les plantes ont besoin d'azote, de phosphore et de potassium, ainsi que des micronutriments et des relations symbiotiques avec des champignons et autres organismes pour croître. Mais obtenir suffisamment d'azote au bon moment, lorsque les plantes en ont le plus besoin, est un défi pour les agriculteurs biologiques, qui doivent gérer cette synchronisation. La rotation des cultures et l'engrais vert contribuent à fournir de l'azote grâce aux légumineuses (plus précisément, la famille des Fabacées) qui fixent l'azote de l'atmosphère par symbiose avec des bactéries rhizobium. La culture associée, qui est parfois utilisée pour le contrôle des insectes et des maladies, peut également augmenter les nutriments du sol, mais la concurrence entre les légumineuses et les cultures peut être problématique et l'espacement entre les lignes de culture est nécessaire. Les résidus de récolte peuvent être charriés dans le sol, et différentes plantes laissent différentes quantités d'azote, ce qui pourrait aider la synchronisation. Les agriculteurs biologiques utilisent également le fumier animal, certains engrais transformés comme la farine de graines et diverses poudres minérales telles que le phosphate de roche et le sable vert, une forme naturelle de la potasse qui fournit du potassium. Ensemble, ces méthodes aident à contrôler l'érosion. Dans certains cas, le pH doit être modifié. Il existe des modificateurs du pH naturel comme la chaux et le soufre, mais aux États-Unis certains composés tels que le sulfate de fer, le sulfate d'aluminium, le sulfate de magnésium, et les produits solubles de bore sont autorisés dans l'agriculture biologique.
Les exploitations mixtes avec bétail et cultures peuvent opérer comme des « ley farms », par lesquelles les terres accumulent de la fertilité par la croissance des graminées fourragères fixatrices d'azote comme le trèfle blanc ou la luzerne cultivée et sur lesquelles poussent des cultures de rente ou de céréales lorsque la richesse du sol est établie. Les fermes sans bétail peuvent trouver qu'il est plus difficile de maintenir la fertilité du sol, et peuvent s'appuyer davantage sur les intrants externes comme les nutriments produits hors de l'exploitation ainsi que les légumineuses à grains et engrais verts, bien que les légumineuses à grains puissent fixer l'azote de façon limitée car ils sont récoltés. Les exploitations horticoles (fruits et légumes) qui opèrent dans des conditions protégées sont souvent encore plus dépendantes des intrants extérieurs.
La recherche sur la biologie et les organismes du sol s'est avérée bénéfique à l'agriculture biologique. Plusieurs variétés de bactéries et de champignons décomposent les produits chimiques, les matières végétales et les déchets d'animaux en éléments nutritifs qui rendent le sol plus productif pour les récoltes à venir. Les champs avec peu ou pas de fumier montrent une baisse considérable des rendements, due à une diminution de la faune microbienne du sol.
Gestion des mauvaises herbes
La gestion des mauvaises herbes de façon biologique favorise la suppression ou la limitation des mauvaises herbes en intensifiant la concurrence des cultures et en ayant recours à leurs effets phytotoxiques sur les mauvaises herbes. En Europe, les agriculteurs biologiques intègrent des tactiques culturales, biologiques, mécaniques, physiques et chimiques pour combattre les mauvaises herbes sans herbicides synthétiques. Les normes biologiques exigent la rotation des cultures annuelles, ce qui signifie qu'une seule culture ne peut pas être cultivée au même endroit sans une autre, la culture intermédiaire. La rotation des cultures biologiques comprend souvent des cultures de couverture avec des cycles de vie différents pour décourager les mauvaises herbes associées à une culture particulière. La recherche est en cours pour développer des méthodes biologiques pour promouvoir la croissance de micro-organismes naturels qui suppriment la croissance ou la germination des mauvaises herbes communes.
D'autres pratiques culturales utilisées pour améliorer la compétitivité des cultures et réduire la pression des mauvaises herbes comprennent la sélection de variétés de cultures compétitives, la plantation à haute densité, l'espacement des rangs serrés, les cultures associées (par exemple céréale et fabacée) et les semis tardifs dans un sol chaud pour favoriser la germination rapide des cultures.
Les pratiques de désherbage mécaniques et physiques utilisés sur les fermes biologiques peuvent être regroupées comme suit :
- Le labour – tourner le sol entre les cultures pour incorporer les résidus de culture et additifs ; enlever les mauvaises herbes existantes et préparer un lit de semence pour la plantation ; tourner le sol à nouveau après le semis pour tuer les mauvaises herbes ;
- La tonte et la coupe – coupe de la partie supérieure des mauvaises herbes ;
- Le désherbage au feu et le désherbage thermique – utilisation de la chaleur pour tuer les mauvaises herbes ;
- Le paillage – blocage des mauvaises herbes avec des matières organiques, films plastiques, ou du tissu ;
- Le binage de précision avec guidage électronique dans le cas de plantes sarclées comme le maïs.
Certains critiques, citant les travaux publiés en 1997 par David Pimentel de l'université Cornell, qui décrit l'érosion des sols comme une menace majeure pour l'agriculture mondiale, pensent que le travail du sol contribue à cette érosion. La FAO et d'autres organisations ont préconisé une approche « sans labour » pour à la fois l'agriculture classique et biologique, et soulignent en particulier que les techniques de rotation des cultures utilisées en agriculture biologique sont excellentes pour cette approche. Une étude publiée en 2005 par Pimentel et ses collègues confirme que « la rotation des cultures et cultures de couverture (engrais vert) typique de l'agriculture biologique réduit l'érosion des sols, les problèmes de ravageurs, et l'utilisation des pesticides ». Certains produits chimiques d'origine naturelle sont autorisés pour une utilisation herbicide. Il s'agit notamment de certaines formulations d'acide acétique (vinaigre concentré), du gluten de maïs, et des huiles essentielles. Quelques bioherbicides sélectifs fondés sur les agents pathogènes fongiques ont également été développés. Pour le moment cependant, les herbicides biologiques et bioherbicides jouent un rôle mineur dans la boîte à outils de contrôle biologique contre les mauvaises herbes.
Les mauvaises herbes peuvent être contrôlées par le pâturage. Par exemple, des oies ont été utilisées avec succès pour éliminer les mauvaises herbes dans des cultures biologiques de coton, de fraise, de tabac et de maïs, et ont relancé la pratique de garder les oies Cotton Patch, qui étaient communes dans le sud des États-Unis avant les années 1950. De même, certains riziculteurs introduisent des canards et des poissons dans les rizières humides pour manger les mauvaises herbes et les insectes.
Contrôle d'autres organismes
Les organismes, autres que les mauvaises herbes, qui causent des problèmes dans les fermes biologiques sont des arthropodes (insectes, acariens), des nématodes, des champignons et des bactéries. Les pratiques biologiques comprennent, mais ne sont pas limitées à :
- Encourager les insectes prédateurs bénéfiques pour lutter contre les ravageurs en installant des plants de pépinière et/ou un habitat alternatif, généralement sous la forme d'un brise-vent, haies, ou banque de coléoptères ;
- Encourager les micro-organismes bénéfiques ;
- Rotation des cultures à différents endroits d'une année à l'autre pour interrompre les cycles de reproduction des ravageurs ;
- Semer des cultures de compagnie et les plantes repoussantes qui découragent ou détournent les ravageurs ;
- Couvrir les rangées pour protéger les cultures pendant les périodes de migration de ravageurs ;
- Utiliser des pesticides et herbicides biologiques ;
- Utiliser l'assainissement pour éliminer l'habitat des ravageurs ;
- Utiliser des pièges à insectes pour surveiller et contrôler les populations d'insectes ;
- Utiliser des barrières physiques.
Contrôle par intervention d'autres vivants
Les insectes bénéfiques prédateurs comprennent les punaises, et dans une moindre mesure, les coccinelles (qui ont tendance à s'envoler), qui tous mangent un large éventail d'organismes nuisibles. Les chrysopes sont également efficaces, mais ont tendance à s'envoler. Les mantes religieuses ont tendance à se déplacer plus lentement et à moins manger. Les guêpes parasitoïdes ont tendance à être efficace pour leur proie choisie, mais comme tous les petits insectes peuvent être moins efficaces à l'extérieur parce que le vent perturbe leur mouvement. Les acariens prédateurs sont efficaces pour lutter contre d'autres acariens.
Les substances autorisées dans la lutte biologique par la réglementation du label AB sont réparties en sept catégories :
- Les substances actives d'origine animale ou végétale (purin d'ortie, huiles végétales, pyréthrines, etc.) ;
- Les micro-organismes ;
- Les substances produites par des micro-organismes ;
- Les substances à utiliser uniquement dans des pièges ou des distributeurs (par exemple phéromones et certains pyréthrinoïdes) ;
- Les préparations à disperser en surface entre les plantes cultivées (molluscicides) ;
- Les autres substances traditionnellement utilisées dans l'agriculture biologique (notamment cuivre, soufre, huile de paraffine, etc.) ;
- Les autres substances telles que l'hydroxyde de calcium et le bicarbonate de potassium.
Les agriculteurs biologiques préfèrent en principe maintenir les équilibres de la faune auxiliaire (y compris les bousiers nécessaires au recyclage rapide des excréments animaux dans le sol) en favorisant la faune utile et les prédateurs naturels plutôt qu'éliminer indistinctement toute activité animale.
Contrôle par intervention chimique
Les insecticides d'origine naturelle autorisés pour une utilisation sur les fermes biologiques comprennent Bacillus thuringiensis (une toxine bactérienne), le pyrèthre (un extrait de chrysanthème), le spinosad (un métabolite bactérien) et l’huile de neem (issue du margousier). Moins de 10 % des agriculteurs biologiques utilisent ces pesticides régulièrement ; une enquête a montré que seulement 5,3 % des producteurs de légumes en Californie utilisent la roténone (interdite dans l'Union européenne), tandis que 1,7 % utilisent le pyrèthre. Ces pesticides ne sont pas toujours plus sûrs ou respectueux de l'environnement que les pesticides synthétiques et peuvent causer des dommages. Certaines de ces substances sont controversées, notamment la roténone, le cuivre, le spinosad et les pyrèthres. La roténone et le pyrèthre sont particulièrement controversées parce qu'ils attaquent le système nerveux, comme la plupart des insecticides conventionnels. La roténone est très toxique pour les poissons et peut induire des symptômes ressemblant à la maladie de Parkinson chez les mammifères. La roténone était autorisée jusqu'au 10 octobre 2008. Bien que le pyrèthre (pyréthrines naturelles) soit plus efficace contre les insectes lorsqu'il est utilisé avec du butoxyde de pipéronyle (qui retarde la dégradation des pyréthrines), les normes biologiques ne permettent généralement pas l'utilisation de cette dernière substance.
Les fongicides autorisés pour une utilisation sur les fermes biologiques comprennent les bactéries Bacillus subtilis et Bacillus pumilus, et le champignon Trichoderma harzianum. Ils sont principalement efficaces contre les maladies affectant les racines. Le thé de compost contient un mélange de microbes bénéfiques, qui pourrait attaquer ou supplanter certaines pathogènes des plantes, mais des précautions doivent être prises au cours de la préparation de ce « thé » pour éviter le développement de microbes toxiques.
Certains pesticides d'origine naturelle ne sont pas autorisés pour une utilisation sur les fermes biologiques. Ceux-ci comprennent le sulfate de nicotine, l'arsenic, la roténone (dans l'Union européenne) et la strychnine.
Les pesticides doivent provenir de substances naturelles ou de leurs dérivés. En Europe, ceux qui sont autorisés sont indiqués dans la réglementation ; on y trouve la laminarine (extrait des algues) ou la pyréthrine (extrait de chrysanthèmes). Certains produits synthétiques sont aussi autorisés, comme l'hydroxyde de calcium (la chaux éteinte), l'huile de paraffine. Certains composés du cuivre sont autorisés, pour permettre la bouillie bordelaise, mais cette permission est très contestée.
Le sulfate de cuivre et la bouillie bordelaise (sulfate de cuivre avec chaux), approuvés pour une utilisation biologique dans différents pays ont fait l'objet de critiques. La bouillie bordelaise, utilisée entre autres en viticulture et arboriculture fruitière biologiques et conventionnelles, est autorisée malgré sa toxicité pour l'environnement. Des préoccupations similaires s'appliquent à l'hydroxyde de cuivre. L'application répétée de sulfate de cuivre ou de l'hydroxyde de cuivre comme fongicide peuvent éventuellement provoquer une accumulation de cuivre à des niveaux toxiques dans le sol, et des avertissements, pour éviter l'accumulation excessive de cuivre dans le sol, apparaissent dans diverses normes biologiques et ailleurs. Les préoccupations environnementales sur plusieurs types d'organismes vivants se posent à des taux moyens d'utilisation de ces substances pour certaines cultures. Dans l'Union européenne, où le remplacement des fongicides à base de cuivre dans l'agriculture biologique est une priorité de la politique, la recherche est en quête d'alternatives pour la production biologique.
Certains agriculteurs biologiques utilisent des insecticides naturels. En France, le neem est souvent interdit dans l'agriculture mais obtient régulièrement des autorisations de mise sur le marché temporaires, notamment du 2 mars au 30 juin 2017 et du 28 février au 28 juin 2018.
La supériorité du profil environnemental des pesticides autorisés par le label AB par rapport aux autres pesticides ne fait pas l'unanimité. Si certains pesticides naturels se dégradent plus rapidement que des produits de synthèse ayant le même usage, d'autres comme le soufre et le cuivre ne sont pas biodégradables.
Semences pour l'agriculture biologique
Les agriculteurs labellisés AB sont tenus d'utiliser des semences issues de multiplication en mode AB (qu'elles soient de ferme ou commerciales). Pour de nombreuses espèces il est toutefois possible d'obtenir des dérogations si les variétés recherchées de semences issues de l'agriculture biologique ne sont pas disponibles : les agriculteurs sont alors libres de planter toutes les semences existantes ou d'acheter toutes les semences du catalogue officiel, sauf les OGM et à la condition qu'elles ne soient pas traitées. Dans chaque pays de l'Union européenne, un site officiel informe les agriculteurs sur les semences biologiques disponibles et leur permet d'enregistrer et d'éditer leurs demandes de dérogations.
La plupart des agriculteurs utilisent des variétés commerciales classiques, y compris les semences de variétés hybrides, en choisissant généralement les plus vigoureuses, les mieux notées pour la résistance aux maladies, aux ravageurs et à la concurrence des adventices. Plusieurs programmes de sélection en cours sont soutenus par le FSOV (fonds de soutien à l'obtention végétale). Ces actions permettent de créer des variétés de céréales destinées en particulier aux agriculteurs biologiques, et également à tous ceux qui cherchent à réduire l'utilisation de produits phytosanitaires.
Élevage
L'élevage d'animaux pour la production de viande, de produits laitiers et d'œufs, est une activité agricole qui fait partie intégrante de l'agriculture biologique. Les fermes biologiques fournissent aux animaux des conditions de vie plus respectueuses du bien-être animal que l'agriculture conventionnelle. L'alimentation des animaux doit être intégralement issue de cultures biologiques. Les étables sont plus diversifiées et les animaux peuvent se mouvoir librement avoir des contacts sociaux, manger, s'occuper conformément à leurs besoins. Les animaux sont engraissés plus lentement.
L'usage d'antibiotiques et de médicaments vétérinaires y est en général réglementé.
Aux États-Unis, il n'y a aucune exigence sur le plan de la protection des animaux pour qu'un produit puisse être désigné comme biologique, il s'agit d'un écart par rapport aux autres pratiques agricoles biologiques.
En outre, historiquement la force des chevaux et du bétail était utilisée pour le labour, leur fumier était utilisé pour l'enrichissement des sols. Alors qu'aujourd'hui, les petites fermes ne comprennent pas de bétail, les animaux domestiqués sont une partie souhaitable de l'équation de l'agriculture biologique, en particulier pour une véritable durabilité, la capacité d'une ferme de fonctionner comme une unité auto-suffisante est primordiale.
Porcs
La caudectomie est interdite dans les élevages porcins labellisés agriculture biologique en France. Cela s'explique par une recherche du bien-être animal plus poussée qu'en élevage conventionnel, ainsi que par une nécessité moindre de prévenir la caudophagie. En effet, dans ce mode de production il est obligatoire de laisser un espace plus important aux animaux ainsi qu'un accès à l'extérieur, les porcs peuvent alors exprimer les comportements propres à leur espèce et souffrent moins de troubles du comportement, dont la caudophagie.
L'élevage porcin biologique doit être conforme à certaines législations communautaires. Il faut beaucoup de lumière du jour pour l'élevage des animaux ; les conditions de base sont également l'exercice et la ventilation naturelle. Il est interdit d'attacher les animaux. La moitié au maximum de la surface au sol peut être constituée de caillebotis ; une surface de couchage sèche et couverte de litière est également nécessaire. Les truies gestantes et les truies non enceinte doivent être élevées en groupes. La taille des cases de mise bas ne doit pas être inférieure à 7,5 mètres carrés. Les éleveurs n'ont pas le droit de mettre les porcelets en cage et il est également interdit de leur limer les dents. L'UE prescrit une période minimale d'allaitement de quarante jours.
Certains de ces règlements entraînent des coûts d'élevage plus élevés, c'est pourquoi il est autorisé un nombre plus élevé de truies en gestation (jusqu'à 40 %). En plus d'élever des truies, il est également obligatoire de les nourrir de façon biologique. Jusque fin 2017, les agriculteurs peuvent acheter des composants protéiques conventionnels sans OGM pour l'alimentation animale s'ils se conforment à la législation communautaire sur l'agriculture biologique. Le mélange de ces composants peut atteindre un maximum de cinq pour cent de l'alimentation. Depuis août 2003, les porcs biologiques ne sont définis comme tels que s'ils ont été élevés selon les méthodes biologiques décrites pendant au moins six mois. Par conséquent, seuls les porcelets issus de l'élevage biologique de truies peuvent être utilisés pour l'engraissement. Si les truies conventionnelles sont achetées, elles doivent alors être élevées selon le mode biologique.
Bovins
En France le cahier des charges pour l'élevage bovin biologique transcrit au niveau national la règlementation cadre définie à l'échelle européenne. L'alimentation du troupeau est d'origine biologique et doit provenir au moins à 50 % de l'exploitation. L'alimentation des veaux est basée sur le lait naturel pendant 3 mois minimum. L'utilisation d'aliments OGM est interdite. Le pâturage est obligatoire quand les conditions météorologiques le permettent. La quantité de concentrés autorisée est limitée à 40 % de la ration journalière en matière sèche. Ce chiffre peut être ramené à 50 % pour une période maximale de trois mois en début de lactation ou en finition. Pour ce qui est de la prophylaxie et des soins vétérinaires, la prévention est la règle prioritaire. L'utilisation de médicaments (hors homéopathie et phytothérapie) et d'antibiotiques est limitée à trois traitements par an et par vache. L'utilisation d'hormones pour le traitement de l'infertilité est contrôlée par le vétérinaire. Le clonage et le transfert d'embryon sont interdits. Le logement des animaux doit respecter une surface minimale par tête et doit comporter une aire d'exercice suffisante. Des dérogations peuvent être accordées dans le cas par exemple des étables entravées si le pâturage est pratiqué une bonne partie de l'année. Le logement des veaux en niche est interdit au-delà d'une semaine.
Volailles
En Suisse, les élevages biologiques de volailles pour la production d'œufs sont des élevages en plein air de 3 000 poules maximum avec une densité maximale de 6 poules/m2 au sol dans le poulailler et 4 m2 par poule en plein air. L'alimentation doit être issue à 95 % de l'agriculture biologique et être à 100 % végétale.
En Suisse, les élevages biologiques de volailles pour la production de chair sont des élevages en plein air de 480 m2 maximum de race rustique à croissance lente. Les poulets sont abattus au plus tôt à un âge de 81 jours. La densité maximale est de 10 poules/m² au sol dans le poulailler et 4 m2 par poule en plein air. L'alimentation doit être issue à 95 % de l'agriculture biologique et être à 100 % végétale.
Modification génétique
Une caractéristique clé de l'agriculture biologique est le rejet de plantes et d'animaux génétiquement modifiés. Le 19 octobre 1998, les participants au 12e Congrès scientifique de l'IFOAM ont publié la Déclaration de Mar del Plata, où plus de six cents délégués de plus de soixante pays ont voté à l'unanimité d'exclure l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés dans la production alimentaire et l'agriculture.
Par contre la culture sélective des plantes et l'élevage sélectif des animaux sont autorisés, ces techniques permettent de sélectionner les plantes et les animaux les plus aptes pour l'agriculture biologique, de la même manière qu'elles ont été utilisées en agriculture conventionnelle pour optimiser les rendements. Cette sélection est primordiale pour l'agriculture biologique pour permettre de trouver les combinaisons de plantes les plus adaptées et pour augmenter les rendements.
Bien que l'opposition à l'utilisation de toutes les technologies transgéniques dans l'agriculture biologique est forte, les chercheurs agricoles Luis Herrera-Estrella et Ariel Alvarez-Morales continuent de préconiser l'intégration des technologies transgéniques dans l'agriculture biologique comme moyen optimal de l'agriculture durable, en particulier dans le monde en développement, comme le fait l'auteur et scientifique Pamela Ronald, qui considère ce genre de biotechnologie comme étant compatible avec les principes biologiques.
Bien que les OGM soient exclus de l'agriculture biologique, le pollen des plantes génétiquement modifiées peut contaminer les semences biologiques et patrimoniales, ce qui rend difficile, voire impossible, d'interdire à ces génomes d'entrer dans la chaîne des aliments biologiques. Le risque de contamination est fonction de la réglementation des organismes génétiquement modifiés appliquée par chaque pays.
Biodiversité
L'agriculture biologique a un impact bénéfique en termes d'abondance et de diversité de presque toutes les espèces selon les études de sol agricole. En moyenne 30 % d'espèces en plus habitent sur les fermes biologiques. Les oiseaux, les papillons, les microbes du sol, les coléoptères, les vers de terre, les araignées, la végétation, et les mammifères sont particulièrement concernés. L'absence d'herbicide et de pesticide améliore la biodiversité et la densité de la population. De nombreuses espèces de mauvaises herbes attirent les insectes bénéfiques qui améliorent la qualité des sols et se nourrissent d'organismes nuisibles. Les micro-organismes du sol bénéficient de l'augmentation des populations de bactéries due aux engrais naturels comme le fumier, et à la réduction de l'apport en herbicide et en pesticide. L'augmentation de la biodiversité, en particulier des microbes bénéfiques pour le sol et des mycorhizes, a été proposée comme mécanisme pour expliquer les rendements élevés enregistrés par certaines parcelles biologiques, en particulier à la lumière des différences observées dans une comparaison de 21 ans de cultures biologiques et de contrôle.
La biodiversité de l'agriculture biologique fournit du capital à l'homme. Les espèces trouvées dans les fermes biologiques améliorent la durabilité en réduisant les interventions humaines (par exemple, les engrais, les pesticides).
En limitant les insecticides de synthèse, l'agriculture biologique protégerait les abeilles. Une première étude a trouvé que des résidus de néonicotinoïdes réduirait la croissance et la production de reines de bourdons terrestre (moins de 85 %). Une seconde étude simulant une contamination du nectar montrerait une réduction du taux de retour des butineuses. Ces travaux ont néanmoins été mis en doute à cause du traitement statistique des résultats et des doses utilisés.
Énergie
Les bilans énergétiques en agriculture, conduits en France à l'échelle des exploitations agricoles depuis 1998, ont montré qu'en céréaliculture biologique, la consommation d'énergie est largement inférieure par unité de surface, comparativement au conventionnel, mais similaire par quantité produite. Pour la production de lait de vache ou de brebis, les bio sont généralement plus efficaces, mais pas pour la production de lait de chèvre.
Aux États-Unis, où les rendements en production végétale bio sont peu inférieurs voire égaux à ceux en conventionnel, l'efficacité énergétique est plus élevée en agriculture biologique qu'en conventionnel, notamment pour le maïs.
La raison principale de cette plus faible consommation d'énergie en agriculture biologique qu'en agriculture conventionnelle est la non-utilisation d'engrais azoté de synthèse, dont la production requiert beaucoup d'énergie, et une plus grande autonomie alimentaire pour nourrir le bétail.
Rendements agricoles
Pour juger des rendements de l'agriculture biologique trois types de données sont disponibles :
- Les rendements de référence au niveau national et international.
- Les rendements en condition contrôlée, réalisés par des scientifiques. Ces chiffres sont souvent comparés au rendement de référence et annonce des résultats 20 à 30 % inférieurs. Pour autant ces performances sont très difficiles à réaliser chez les agriculteurs.
- La production alimentaire nette, le label AB contraignant parfois à des cultures non productives pour améliorer la fertilité du sol ou désherber, et font aussi face à des pertes de culture beaucoup plus fréquentes. Il existe très peu de données de ce type.
Les études comparant les rendements ont des résultats mitigés[210].
En France le rendement du blé biologique est de 33 quintaux par hectare contre 70 pour le conventionnel.
Une étude réalisée par l'INRA dans le cadre du programme écophyto montre des pertes de rendements de 30 à 70 % pour différentes cultures
|
||||||||||||||||||||||||||||||
Une étude publiée en 1990 a réalisé « deux cent cinq comparaisons de rendement de systèmes agricoles biologiques et conventionnels (...). Les données de 26 cultures et deux produits d'origine animale, sous la forme du ratio des rendements biologiques par rapport aux rendements conventionnels, étaient normalement distribuées avec une moyenne de 0,91, un écart-type de 0,24 et une valeur modale entre 0,8 et 0,9. Plus de la moitié des comparaisons des rendements de production de lait et de haricots ont affiché un ratio supérieur à 1, soit des rendements plus élevés à partir des systèmes biologiques. Il n'y avait pas de preuves pour démontrer que les systèmes biologiques avaient un effet sur la variabilité annuelle des rendements, qu'elle soit causée par le climat ou par des effets de transition ou de conversion ». L'étude a également discuté des difficultés de procédure en comparant la productivité des systèmes biologiques avec d'autres systèmes d'exploitation.
Une étude américaine publiée en 2001 a analysé les données de 150 saisons de croissance de cultures de céréales et de soja et a conclu que les rendements biologiques étaient identiques (ratios dans la fourchette 95–100 %) aux rendements classiques.
Une étude qui a duré deux décennies a été publiée en 2002 et a trouvé un rendement de 20 % plus faible pour l'agriculture biologique, en utilisant 50 % moins d'engrais, 97 % moins de pesticides, et une consommation d'énergie de 34 % à 53 % plus faible.
Une étude de 2003 a constaté que pendant les périodes de sécheresse, les fermes biologiques peuvent avoir des rendements de 20 à 40 % plus élevés que les fermes conventionnelles. Les fermes biologiques sont plus rentables dans les états les plus secs des États-Unis.
Les fermes biologiques survivent beaucoup mieux aux dégâts des ouragans en conservant 20 à 40 % plus de terre végétale, et les pertes économiques sont plus faibles que pour les fermes conventionnelles.
Une étude publiée en 2005 a comparé agriculture conventionnelle, agriculture biologique d'origine animale, et agriculture biologique à base de légumineuses sur une ferme de test à l'Institut Rodale pendant plus de 22 ans. L'étude a révélé que « les rendements des cultures de maïs et de soja étaient similaires dans le biologique animal, le biologique légumineuse, et les systèmes agricoles traditionnels ». Elle a également constaté que « beaucoup moins d'énergie fossile avait été dépensée pour produire du maïs dans les systèmes biologiques légumineuse et biologique animal de l'Institut Rodale, que dans le système de production classique ». Il y avait peu de différence dans l'apport d'énergie entre les différents traitements pour la production de soja. Dans les systèmes biologiques, engrais et pesticides de synthèse ne sont généralement pas utilisés. En 2013 l'étude Rodale était toujours en cours et un rapport pour l'anniversaire des trente ans a été publié par Rodale en 2012.
L'agriculture biologique a été comparée à l'agriculture classique dans des études portant sur les pommes en France.
Une étude réalisée en Angleterre a montré que les rendements par hectare en agriculture biologique pour un échantillon d'exploitations s'établissaient à seulement 45 % de ceux obtenus par l'agriculture conventionnelle. D'autres études mettent en avant l'importance de l'ensemble de l'environnement général (présence de cultures variées, de prairies permanente, de bordures de champs non fauchés ou désherbés, taille des parcelles) plutôt que l'usage de la chimie surtout quand ils comparent l'agriculture biologique et l'agriculture de conservation.
Le système de riziculture intensive est une méthode de culture du riz utilisée dans quelques pays en développement, qui respecte les principes de l'agriculture biologique et permet d'atteindre des rendements supérieurs à ceux obtenus en agriculture conventionnelle, au prix d'un recours à davantage de main-d'œuvre.
En élevage, les différences de rendement ne sont pas significatives, la croissance des animaux n'est pas affectée par la nature « biologique » des aliments, ce sont plus les conditions du terrain et les choix des éleveurs (notamment concernant la qualité) qui conditionnent les vitesses de croissance. Pour l'élevage de ruminants, les différences de pratique entre le biologique et le conventionnel sont faibles, ce qui explique les importantes surfaces de prairie certifiées AB en France. Pour l'élevage de volaille ou de porcins, hormis les aliments un peu plus coûteux et les durées d'élevages plus longues (mais pas forcément plus longues que certains labels de qualité), les performances pures des animaux ne sont pas affectées.
Une étude publiée en 1999 par l'Agence danoise pour la protection de l'environnement a constaté que, zone pour zone, les fermes biologiques de pommes de terre et de betteraves à sucre ont une productivité inférieure de moitié à celle de l'agriculture conventionnelle. Michael Pollan, auteur de « Le dilemme de l'omnivore », répond en soulignant que le rendement moyen de l'agriculture mondiale est nettement plus faible que les rendements modernes d'agriculture durable. Augmenter les rendements moyens mondiaux à des niveaux biologiques modernes pourrait augmenter l'approvisionnement alimentaire du monde de 50 %.
Une autre étude de 2007 qui compile 293 rapports de recherche différents en une seule étude afin d'évaluer l'efficacité globale des deux systèmes agricoles a conclu que « les méthodes biologiques pourraient produire suffisamment de nourriture sur une base globale par habitant pour soutenir la population humaine actuelle, et potentiellement une population encore plus large, sans pour autant augmenter la base des terres agricoles ». Les chercheurs ont également constaté que dans les pays développés, les systèmes biologiques ont, en moyenne, un rendement de 92 % par rapport à l'agriculture conventionnelle, alors que les systèmes biologiques produisent 80 % de plus que les fermes conventionnelles dans les pays en développement. Cette différence en faveur de l'agriculture biologique observée dans les pays en développement est due au fait que les rendements des exploitations conventionnelles prises pour référence sont très bas, car il s'agit généralement d'une agriculture de survie extensive ; par ailleurs les intrants synthétiques sont difficiles d'accès dans certains pays en développement. Cette conclusion a été contestée par une autre étude publiée la même année, intitulée « L'agriculture biologique ne peut pas nourrir le monde ». L'auteur considère que les résultats ne sont pas valides parce que les données ont été mal interprétées. En effet, il observe que les ratios utilisés pour les pays en développement reposent sur des données issues d'exploitations biologiques ayant recours à un apport extérieur de nutriments, un modèle qu'il est difficile d'étendre à une grande échelle.
Une étude méta-analyse publiée en 2012 suggère que les agriculteurs devrait adopter une approche hybride pour produire assez de nourriture pour les humains tout en préservant l'environnement.
S'il est vrai que l'agriculture biologique nécessite plus de terre au détriment de la faune et de la forêt, les progrès récents résolvent la plupart de ces problèmes. Selon une méta-analyse de 115 études publiée en décembre 2014, le rapport de productivité entre agricultures biologique et conventionnelle, de 80,8 % en moyenne, pourrait encore progresser ; les exploitations biologiques qui pratiquent les cultures associées ou en rotation obtiennent des rendements qui se rapprochent en effet davantage de ceux des exploitations conventionnelles (ratio de 91 % pour les cultures associées et 92 % pour les cultures en rotation).
Selon le professeur Wolfgang Branscheid toutefois, la production animale biologique n'est pas bonne pour l'environnement, car le poulet biologique nécessite deux fois plus de terres par rapport à l'élevage conventionnel et le porc biologique a besoin d'un quart de superficie en plus. Selon un calcul effectué par l'Institut Hudson, le bœuf biologique nécessite trois fois plus de terres. Inversement, certaines méthodes biologiques d'élevage ont permis de restaurer des terres désertifiées ou marginales et de les rendre disponibles pour la production agricole ou la faune. D'autres pratiques permettent de combiner production de fourrage et cultures de rente sur les mêmes domaines simultanément, ce qui permet de réduire l'utilisation des terres.
En résumé de son rapport d'octobre 2013 « Vers des agricultures à hautes performances », l'INRA observe que, si des progrès en matière de productivité sont possibles, les « performances environnementales au sens large – consommation de ressources naturelles et protection des biens environnementaux – sont plus élevées » pour l'agriculture biologique que pour l'agriculture conventionnelle. Elle indique toutefois dans le corps du rapport que cette supériorité s'entend « par unité de surface », qu'elle « se réduit et peut même s'inverser quand les performances sont mesurées par unité de produit », et que globalement « le résultat est identique pour les performances environnementales ».
Dans le Sud-Ouest de la France, des chercheurs ont observé et comparé pendant six ans 180 ruches, les unes menées en conventionnel et d'autres en agriculture biologique. Les résultats publiés le 26 juin 2019 montrent que les ruches entourées de cultures bio ont produit plus de couvain et de miel que celles des cultures conventionnelles. L'effet positif des cultures bio est expliqué par la diversité des sources de pollens, l'abondance des fleurs mellifères soutenue durant l'année et la baisse de mortalité des abeilles et couvains par rapport à celles qui sont exposées aux pesticides.