Fagus sylvatica - Hêtre commun.

Fagus sylvatica - Hêtre commun

(Fabaceae)

Le Hêtre commun, Fagus sylvatica, couramment désigné simplement comme le hêtre, est une espèce de plantes à fleurs de la famille des Fagaceae, tout comme le chêne et le châtaignier. C'est un arbre à feuilles caduques, indigène d'Europe.

Il est l'une des principales essences forestières constitutives des forêts tempérées caducifoliées d'Europe où on peut le trouver en peuplements exclusifs de hêtraies pures ou le plus souvent associé à d'autres espèces majeures dans des forêts feuillues, principalement avec le Chêne rouvre, ou dans des forêts mixtes avec le sapin blanc ou l'Épicéa commun.

C'est une essence bioindicatrice d'un climat tempéré humide. Les forestiers en pratiquent de longue date la sylviculture pour produire du bois de futaie principalement destiné à l'ameublement. Il est également utilisé comme source de bois de chauffage, surtout en zone de montagne.

Fagus sylvatica

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Planche botanique de Fagus sylvatica,
extraite des
Plantes médicinales de Köhler (1887).

Classification Tropicos

Règne

Plantae

Classe

Magnoliopsida

Sous-classe

Magnoliidae

Super-ordre

Rosanae

Ordre

Fagales

Famille

Fagaceae

Genre

Fagus

Espèce

Fagus sylvatica
L., 1753

Synonymes

  • Castanea fagus Scop.
  • Fagus aenea Dum.Cours.
  • Fagus cochleata (Dippel) Domin
  • Fagus echinata Gilib.
  • Fagus incisa Dippel
  • Fagus laciniata A.DC.
  • Fagus orientalis Lipsky (préféré par UICN)
  • Fagus pendula (Lodd.) Dum.Cours.
  • Fagus quercoides (Pers.) Dippel
  • Fagus salicifolia A.DC.
  • Fagus silvatica L.
  • Fagus sylvatica orientalis (Lipsky) Greuter & Burdet
  • Fagus sylvatica var. atropunicea Weston
  • Fagus tortuosa (Dippel) Domin
  • Fagus variegata A.DC.

Dénominations

Étymologie

Le nom latin du hêtre, fāgus, a donné en (ancien) français et dialectal fou, fāgeus a donné faggio en italien et fāgea > haya en espagnol, etc. Il est issu de l'indo-européen *bʰeh₂g-o- « hêtre », duquel procèdent le grec ancien phēgós « chêne » et le germanique *bōk- (cf. le néerlandais beuk, allemand Buche, anglais beech, suédois bok, tous au sens de « hêtre »). Les Germains ont utilisé des bâtonnets en bois de hêtre pour écrire les runes, d'où l'allemand Buchstabe « lettre », mot-à-mot « bâton de hêtre », et Buch « livre », même parenté entre l'anglais beech « hêtre » et book « livre » (cf. vieil anglais bōcstæf « lettre, caractère écrit » > anglais bookstaff, -stave, plutôt rare et archaïque), le néerlandais beuk « hêtre » et boek « livre ».

Le nom vernaculaire du hêtre est issu du vieux bas francique *haitr (non attesté) ou directement du vieux néerlandais hēster, heister (d'où aussi le néerlandais heester « arbuste »), composé d'un radical germanique *χais- « buisson d'arbustes, fourré » (conservé dans la toponymie : Hees, l'un dans l'Utrecht, l'autre dans le Brabant-du-Nord) et du suffixe -ter qui est la forme atone de *dra « arbre » provenant d'une forme *trewam (qui a donné aussi en anglais le mot tree « arbre »[11] ou en allemand la syllabe finale -der du mot Holunder « sureau »). Par antonomases successives, il a désigné un buisson, puis probablement une clôture de branches de hêtre puis le tronc et l'arbre lui-même : cette évolution est attestée par la racine *hais romanisée en *hasia qui se retrouve aussi dans le vieux mot hazier ou l'ancien français haise qui désigne une « barrière de branches entrecroisées » ou haiset une « petite porte rustique en branches de hêtre ».

Albert Dauzat considère que le francique *haistr ne supplante l’ancien français fou qui est le terme le plus fréquemment utilisé au Moyen Âge mais abandonné par la suite, à cause de son homonymie avec le terme fou « personne atteinte de folie », puis fayard (franco-provençal) ou fouteau (Normand foutel), termes dérivés à partir de l'étymon latin fagus. Hêtre apparaît dans un texte de 1210 (cartulaire de Saint-George), sous la forme latinisée hestrum, désignant « un petit hêtre » : les jeunes troncs étaient coupés pour servir de balai, de fouet ou de protection. Le terme hêtre a fini par désigner l'arbre adulte (ce sens est attesté dès 1301) et, par métonymie, le bois de cet arbre. L’ancien français fou puis fayard ou fouteau coexistent avec hestre jusqu'au XVIIe siècle et sont encore employés dans le français régional.

Émile Littré, dans son Dictionnaire de la langue française, illustre cette évolution par différentes citations littéraires :

« Tityre, tu patulae recubans sub tegmine fagi
Silvestrem tenui musam meditaris avena. »

— Virgile, Bucolique 1, v.1-2, Ier siècle av. J.-C.

« Les pins, sapins, hestres ou fousteaux dits aussi faux,
Et les charmes, sont arbres de montagne froide. »

— Olivier de Serres, 1600

« Et dans mon cabinet assis au pied des hêtres,
Faire dire aux échos des sottises champêtres. »

— Boileau, Satire IX, 1668

Le nom scientifique Fagus est formé directement à partir du nom fāgus qui désignait le hêtre en latin (de ce terme latin dérivent les mots fouet fait à l'origine d'une baguette de hêtre ; fouine friande de faînes, passe pour loger de préférence dans cet arbre; fayard, bois de hêtre ou grand hêtre servant à la reproduction ; faîne, fruit du hêtre). Quant à l’épithète spécifique sylvatica, au sens originel, c'est un dérivé du latin silva « forêt » avec le double suffixe -at-ica qui signifie à la fois « qui est fait pour le bois » et sauvage.

Appellations et toponymes

 Le terme « hêtre », sans autre précision, est bien employé généralement pour désigner l'espèce Fagus sylvatica. Pour le distinguer le cas échéant des autres représentants du genre Fagus, on peut alors préciser qu'il s'agit du « Hêtre commun ». L'appellation « hêtre européen » est en revanche un anglicisme, une traduction littérale de European beech.

On trouve, selon les régions, de nombreuses dénominations locales dérivées de son nom latin fagus : fou, foutel, fouteau, faye, foyard, fau, faon, fayard (mot francoprovençal et nord-provençal), fayaud, favinier, faou, etc.

Outre un usage répandu dans une grande partie sud-est de la France, ainsi qu'en Suisse romande, l'appellation fayard (ou sa variante foyard) est également employée par les forestiers lors des inventaires ou des martelages, lorsqu'il faut désigner à voix haute l'espèce, à la place du mot hêtre, trop peu sonore.

La racine norroise bóki se retrouve dans les toponymes normands Bouquelon, la Bouquelonde (littéralement « hêtraie ». cf. norvégien bøkelund « hêtraie ») et Bouquetot, très nombreux au nord-est de la Normandie où cet arbre est plus commun qu'à l'ouest. Il est cependant en concurrence avec les types romans que l'on trouve partout dans la France du nord : Fy ; Fay, c'est-à-dire « hêtraie ». On y trouve également la variante la Fontelaye, la Foutelaye, dérivé de foutel « hêtre ». Dans les langues slaves, on trouve notamment le mot buk en tchèque pour désigner le hêtre, qui aurait donné son nom à la Bucovine, littéralement « hêtraie » ou « pays des hêtres ».

La langue occitane a fourni un autre type toponymique pour désigner une hêtraie, il s'agit de Fage, d'où Lafage ou encore en occitan gascon Lahage (Haute-Garonne). Ces toponymes reposent sur le nom du hêtre en occitan : ancien occitan *fag (languedocien fau) dérivés en -ia, d'où la terminaison francisée -e. Le provençal utilise les termes de fau et faiard. Dans le texte Kalenda Maya de Raimbaut de Vaqueiras on retrouvait l'appellation de faya pour désigner le hêtre.

Une forêt où le hêtre domine est une hêtraie (en wallon : faweux).

Synonymes scientifiques

Le binôme Fagus sylvatica apparaît sous la plume de Carl von Linné dès la première édition de Species Plantarum en 1753. Auparavant c'était tout simplement Fagus, comme mentionné par Joseph Pitton de Tournefort en 1698 dans son Histoire des Plantes.

Nombreuses furent ensuite les tentatives d'élever au rang d'espèces à part entière les différentes formes et variétés mais elles se révélèrent toutes n'être que de simples variations de Fagus sylvatica.

La dénomination scientifique Fagus sylvatica est donc restée remarquablement stable. Le seul véritable synonyme homotypique reste celui résultant en 1772 de la proposition de Giovanni Antonio Scopoli de rattacher l'espèce aux châtaigniers sous le nom Castanea fagus.

Description

Allure générale

Le Hêtre commun est un grand arbre. Sur les sols de bonne fertilité, il peut s'élever facilement jusqu'à 30 à 35 m de hauteur et la circonférence de son tronc peut couramment atteindre 3,50 m chez des hêtres centenaires. Des sujets exceptionnels ont été mesurés jusqu'à 45,5 m de hauteur et on a répertorié certains troncs dont le tour dépasse les 6 m. Inversement, lorsqu'il croît en lisière haute des forêts de montagne et que de plus il est régulièrement brouté par le bétail ou par les cervidés, il peut alors rester prostré à hauteur d'homme.

La silhouette varie selon le traitement forestier et l'habitat. En futaie, le hêtre développe un tronc long et mince, dégagé de ses branches jusqu'à 15 ou 20 m de hauteur et le houppier est étroit avec des branches redressées à 60°. En situation isolée, le fût est très court et le houppier large et haut, aux branches étalées, pouvant couvrir 600 m2.

Il rejette difficilement de souche : parfois à l'étage montagnard, pratiquement jamais à l'étage collinéen.

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Hêtre centenaire, à Seyssinet-Pariset, Isère.

Écorce

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La mauvaise aptitude à l'auto élagage chez le hêtre commun se caractérise par la persistance sur la partie inférieure du tronc, de grosses branches qui forment un angle aigu avec le fût, de trous laissés par la chute tardive (et difficile) de ces branches, ou par une écorce parsemée d'étranges « yeux » (cicatrisations entourées des deux brins pendants, appelées « moustaches de chinois » à bouche ouverte).

Parmi les arbres d'Europe tempérée, le Hêtre commun se reconnaît facilement à son écorce mince et lisse qui persiste ainsi tout au long de la vie de l'arbre. La surface du tronc est régulière, contrairement au Charme (Carpinus betulus) dont l'écorce est également lisse mais la surface cannelée. Elle devient légèrement rugueuse (présence de petites fissures) à la base du tronc chez les vieux sujets. Très exceptionnellement, certains individus décrits comme Fagus sylvatica f. quercoides peuvent développer une écorce crevassée — un rhytidome — dont la survenue semble d'origine traumatique car non génétiquement transmissible. Le Hêtre a en effet un seul phellogène qui fonctionne pendant toute la durée de vie de l'arbre alors que chez la plupart des autres espèces (et au niveau de la base du tronc des hêtres âgés), ce sont plusieurs phellogènes qui se succèdent au cours de leur vie et sont à l'origine d'un rhytidome.

L'écorce présente une couleur qui varie du gris argenté (sujet jeune) au gris noirâtre ou gris-vert (arbre adulte), mais elle apparaît souvent recouverte d'une fine croûte de lichens qui donnent au tronc une teinte gris argenté caractéristique. Sous climat humide, la végétation épiphyte du tronc et des branches peut être plus exubérante, et se composer de lichens fruticuleux ou foliacés, de mousses, de petites fougères… Dans certaines régions, ou sous l'effet de la pollution atmosphérique, les lichens peuvent au contraire être remplacés par une pellicule verte d'algues microscopiques (comme Pleurococcus vulgaris).

La finesse de son écorce est due à une seule assise génératrice externe (le phellogène) pour toute la vie de l'arbre. Cette assise, « ainsi que le phelloderme auquel elle donne naissance, gardent la propriété de pouvoir se diviser radialement, permettant à ces tissus d'épouser parfaitement le tronc lorsque celui-ci augmente de circonférence du fait de la production de xylème et de liber. En revanche, les cellules issues du côté externe de cette même assise formant le suber, ont perdu cette propriété. Ne pouvant plus s'accroître tangentiellement, cette couche de cellules fortement tendue finit par se fissurer ; les crevasses peu profondes (0,25 mm) ainsi formées, sont cependant à peine visibles ». La fine écorce rend l'arbre particulièrement fragile aux blessures de toutes sortes. Des gravures au couteau de poche peuvent blesser le liber et freiner ou stopper la croissance de toute une partie de l’arbre. Toujours en raison de cette finesse, l'écorce peut être affectée par de nombreuses maladies et dégâts.

Feuillage

Les feuilles alternes sont entières et simples, de forme ovale à obovale, longues de 6 à 10 cm et larges de 4 à 7 cm, brillantes et légèrement coriaces. La base est cunéiforme, l'extrémité pointue. La marge des feuilles forme des petites dents arrondies aux extrémités de 5 à 8 paires de nervures. Le pétiole, cannelé, d'une longueur d'environ 1 cm porte une pubescence blanche dense. Le bord des jeunes feuilles est frangé de poils qui disparaissent ensuite. Pour retenir cette particularité, les botanistes néophytes disposent d'un mnémonique humoristique qui permet de distinguer la feuille de hêtre de celle du charme, de forme voisine : « Le charme d'Adam (à dents), c'est d'être (hêtre) à poils », rappelant ainsi la nature du bord du limbe (doublement dentés en scie pour le charme, cilié et entier ou grossièrement denticulé pour le hêtre). Comme chez de nombreux arbres, les feuilles sont hypo stomatiques, elles ne portent des stomates qu'à leur face inférieure, à la densité moyenne de 340 par millimètre carré, ce qui les protège du soleil et les abrite des vents desséchants, permettant de réduire la perte d'eau par évaporation. La face supérieure est glabre, vert clair puis vert foncé lustré tandis que la face inférieure est vert clair, à pubescence axillaire et à nervures légèrement saillantes.

Le feuillage est fréquemment marcescent, des feuilles mortes restent attachées aux branches pendant une partie plus ou moins longue de l'hiver. Le phénomène affecte surtout les jeunes arbres. Chez des arbres plus développés, ce sont les parties basses et abritées qui gardent leurs feuilles, alors que les houppiers ont souvent été dégarnis dès les premiers vents d'automne. La marcescence est également courante sur les hêtres traités en haies, qu'elles soient libres ou taillées.

Les bourgeons, longs de 1,5 à 3 cm, larges de 2 à 3 mm, nettement écartés des rameaux, sont fusiformes : particulièrement effilés et à pointe acérée. Ils sont couverts par des écailles brun clair, nombreuses, coriaces et luisantes.

Les tout jeunes rameaux portent une pubescence soyeuse, présentent une couleur vert-brun et croissent en zigzag alternativement d'un nœud à l'autre. Au cours de l'année, ils deviennent glabres et plus ternes, d'une couleur brun-violet. Ils portent des lenticelles ovales légèrement ocrées.

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Les feuilles sont simples et entières, légèrement crénelées sur les bords.

Fleurs et fruits

Le Hêtre commun est une espèce monoïque : un même arbre porte les deux sexes sur des fleurs différentes. La floraison intervient en avril ou mai, juste après la feuillaison : les bourgeons floraux, plus larges (4 à 5 mm) que les bourgeons végétatifs dont ils sont issus par induction florale, évoluent en fleurs lorsque le hêtre est âgé de 40 à 50 ans en milieu ouvert, 60 à 80 ans en peuplement dense. Les fleurs mâles, à huit étamines chacune, sont disposées (en moyenne 15 par inflorescence) en chatons globuleux (ces chatons d'abord jaunes puis bruns sont constitués d'épis de cymes triflores) à l'extrémité d'un long pédoncule pendant de 2 cm sur un jeune rameau ; les fleurs femelles vertes, situées dans les aisselles foliaires des rameaux de l'année (près de la zone apicale), sont réunies par deux, plus rarement trois ou quatre, dans une enveloppe florale, un involucre hérissé de pointes molles, au bout d'un pédoncule pubescent court et dressé. Fleurs mâles et femelles sont dépourvues de pétales, les sépales fusionnés forment des écailles qui forment quatre à six lobes sur les périanthes mâles, six lobes sur les périanthes femelles. La formule florale s'exprime donc ainsi : ♂S (4-6) E8 C0 et ♀S6 E0 C (3)

La pollinisation est anémophile et la fécondation allogame.

Les faînes sont les fruits du hêtre. Ce sont des akènes de la catégorie des nucules : leur paroi, le péricarpe, est dure et ne s'ouvre pas pour libérer les graines. Les faînes sont environ longues de 2 cm et larges de 1 cm. Elles ont la forme d'un tétraèdre à base bombée, de couleur brune, à surface vernissée ; elles ressemblent à de minuscules châtaignes triangulaires. Chaque faîne contient en général une seule graine, sans albumen, dont les cotylédons pliés en accordéon servent de tissu de réserve nourricière pour la future plantule.

Elles sont enfermées par deux, parfois trois ou quatre, dans une cupule ligneuse hérissée d'épines recourbées molles, issue de la condensation de l'involucre floral. Celle-ci, qu'autrefois certains appelaient « brou », s'ouvre par quatre fentes, parfois trois, pour former autant de valves.

Les faînes sont des fruits secs riches en lipides et glucides. Elles sont comestibles, mais les tanins les rendent légèrement astringentes et toxiques pour l'homme si elles sont consommées en quantité. Elles sont très appréciées des rongeurs (écureuils, mulots, loir, muscardin, campagnols…), des blaireaux, des sangliers et des oiseaux (pigeons ramiers, pinsons, pics…) qui participent à leur dissémination (dyszoochorie) lorsqu'elles sont tombées au sol.

La germination est épigée : la croissance de la radicelle et le gonflement de la plantule provoquent l'expulsion, hors de l'enveloppe de la faîne, des cotylédons qui se déploient pour former deux larges feuilles primordiales, demi-circulaires et auriculées à la base qui assureront la photosynthèse pendant tout ou partie de la première année du jeune arbre.

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La floraison intervient alors que la feuillaison est encore en train de se déployer.

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Chatons femelles (en haut) ; chatons mâles (en bas).

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A maturité, les cupules s'ouvrent et libèrent chacune deux à quatre faînes.

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Fruit immature d'un hêtre.

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La germination est épigée, elle soulève la faîne d'où sortiront les deux cotylédons.

Système racinaire

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Chêne (Quercus robur) et Hêtre (Fagus sylvatica) "siamois" dans le parc de la Salle de sport de La Vraie-Croix (Morbihan). Systèmes racinaire et aérien en hiver.

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Système racinaire puissant, souvent traçant.

Le système racinaire du hêtre est à la base un système « en cœur » puissant, avec de nombreuses racines multidirectionnelles et souvent soudées entre elles, qui en l'absence de contraintes peut s'installer assez profondément. Cet enracinement n'est cependant pas capable de franchir des obstacles du sol tels que des couches compactes et mal drainées ou des couches indurées. Les racines tendent alors par compensation à se développer horizontalement en surface et confèrent alors au hêtre sa réputation d'arbre à enracinement superficiel. Une telle assise de l'arbre en « galette » peut alors le rendre plus sensible au renversement par le vent que s'il s'agissait d'une autre essence forestière. L'espèce peut néanmoins y trouver un avantage concurrentiel sur certains types de sols, notamment sur dalle rocheuse, car la surface racinaire étendue augmente la capacité de captation de l'eau.

Le système racinaire peut varier en forme selon la profondeur du sol, l'épaisseur de la couche d'humus ou le degré de mycorhization des racines.

Formes et variétés

Formes naturelles

 

Deux formes naturelles du Hêtre commun sont particulièrement remarquables et connues.

Le Hêtre pourpre (Fagus sylvatica f. purpurea (Aiton) C. K. Schneid) fut découvert en plusieurs endroits et sa première localisation connue fut en 1600 en Suisse, près de Buchs, ensuite dans la forêt de Darney dans les Vosges, puis près de Zurich, puis en Thuringe ou dans le Tyrol. On peut trouver des semis à l'état disséminé dans les hêtraies. Il connaît un succès constant comme grand arbre d'ornement. Ses feuilles sont lisses à bord ondulé et présentent une couleur pourpre à cause d'une teneur élevée en anthocyanidine, mais selon les saisons elles peuvent varier avec du rose ou une forme de pourpre brillant qui masque la teinte verte de la chlorophylle. Arrivées à maturité, les feuilles deviennent plus foncées et aussi un peu plus petites et plus ovales, et leurs extrémités sont plus arrondies.

Le Hêtre tortillard (Fagus sylvatica f. tortuosa (Pépin) Hegi) est une forme arbustive à troncs et branches contournés. Le site le plus connu en France, qui en regroupe un nombre notable, est celui des « faux de Verzy », en montagne de Reims. On connaît aussi des individus plus ou moins isolés en Auvergne, en Bretagne et en Lorraine, ainsi qu'en Allemagne, au Danemark et en Suède.

Variétés horticoles (cultivars)

Il existe ainsi des cultivars à feuillage rouge foncé (Fagus sylvatica 'Atropurpurea'), certains à feuilles étroites profondément lobées (Fagus sylvatica 'Laciniata'), d'autres à port pleureur (F. sylvatica 'Pendula') ou à port en colonne étroite (F. sylvatica 'Fastigiata'), et d'autres encore :

  • Fagus sylvatica 'Albovariegata'
  • Fagus sylvatica 'Ansorgei'
  • Fagus sylvatica 'Asplenifolia' (feuilles étroites lancéolées profondément découpées)
  • Fagus sylvatica 'Aurea Pendula'
  • Fagus sylvatica 'Cochleata'
  • Fagus sylvatica 'Cristata'
  • Fagus sylvatica 'Dawyckii' (port étroit)
  • Fagus sylvatica 'Dawyck Gold'
  • Fagus sylvatica 'Dawyck Purple'
  • Fagus sylvatica 'Grandifolia'
  • Fagus sylvatica 'Rohanii'
  • Fagus sylvatica 'Rohan Trompenburg'
  • Fagus sylvatica 'Interrupta Purpurea'
  • Fagus sylvatica 'Interrupta'
  • Fagus sylvatica 'Miltonensis'
  • Fagus sylvatica 'Purpurea Pendula'
  • Fagus sylvatica 'Purple Fountain'
  • Fagus sylvatica 'Spaethiana'
  • Fagus sylvatica 'Swat Magret'
  • Fagus sylvatica 'Frisio'
  • Fagus sylvatica 'Purpurea Nana'
  • Fagus sylvatica 'Purpurea Tricolor' ou 'Roseomarginata'
  • Fagus sylvatica 'Luteovariegata'
  • Fagus sylvatica 'Quercina'
  • Fagus sylvatica 'Red Obelisk'
  • Fagus sylvatica 'Rohan Gold'
  • Fagus sylvatica 'Rotundifolia'
  • Fagus sylvatica 'Tortuosa Purpurea'
  • Fagus sylvatica 'Silverwood'

Développement

Le débourrement des bourgeons a lieu tardivement. Entre autres signes et indices biologiques ou chimiques, le hêtre reconnaît le moment propice à l'éclosion à la durée journalière d'ensoleillement. C'est pour cette raison que le débourrement du hêtre a lieu chaque année fin avril, début mai avec une remarquable précision (à peu de jours près), pourtant plus précoce dans le nord qu'au sud, à 600 m d'altitude du niveau de la mer.

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Le débourrement est principalement placé sous l'influence de la durée du jour et intervient au printemps quasiment à date fixe.

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Les plantules de l'année étalent leurs deux grandes feuilles cotylédonaires caractéristiques.

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Bourgeon de hêtre commun.

Chaque bourgeon contient depuis sa formation au cours de l'été précédent, la totalité des feuilles qui composeront le rameau (entre 3 et 11). Comme chez de nombreux feuillus, le bourgeon terminal émet au printemps une hormone inhibitrice qui freine le développement des bourgeons adventifs. Cette tendance, très forte au début de leur existence (croissance annuelle de 40 à 70 cm pour un hêtre jeune de 30 à 50 ans), s'affaiblit chez les vieux sujets.

Ce n'est qu'après le débourrement que la croissance des racines commence : il apparaît d'abord de très fines racines (de diamètre inférieur à 0,5 mm) puis après la vague d'allongement aérien, des racines moins fines croissent de façon rythmique.

La floraison se produit essentiellement entre 30 et 80 ans.

Le hêtre fructifie à partir de 60 ou 80 ans et jusqu'à 200 ans. Cette fructification qui a lieu tous les ans, est très abondante sur tout le massif forestier l'année suivant un été chaud, ensoleillé et sec, mais jamais deux années de suite.

Comparée à celle d'autres espèces de grands arbres, comme les chênes, les châtaigniers, les tilleuls, la longévité du Hêtre commun est réputée plus limitée. Il survit en effet mal à une perte de son intégrité, que le dommage soit dû à un accident ou simplement au vieillissement. En général les hêtres atteignent 150 à 200 ans, et souvent les vieux individus ne vont guère jusqu'à 300 ans. On connaît cependant certains sites naturels de très vieux arbres, notamment en Italie dans la vallée Cervara des Abruzzes, où le comptage des cernes d'accroissement a révélé des âges bien plus élevés, jusqu'à 503 ans.

Écologie

Exigences (autoécologie)

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Ces girolles qui émergent d'une litière de feuilles de Hêtre commun, ne sont en fait que les « fructifications » (les sporophores communément appelés champignons) d'un organisme fongique dont les filaments souterrains (le mycélium) vivent pour partie en association avec les racines de l'arbre.

Peu difficile quant à la nature du sol, le hêtre affectionne des terrains calcaires ou légèrement acides. Il peut s'accommoder de sols superficiels. Ainsi, le trouve-t-on plus volontiers à flanc de coteau qu'au fond d'une cuvette argileuse.

Il résiste bien aux froids rigoureux en hiver, mais il est très sensible aux gelées de printemps.

Le rôle des mycorhizes est considérable pour cette espèce, qui sans elles ne peut vivre ni se développer normalement. Les fonctions de cette symbiose sont complexes et concernent schématiquement : l'alimentation en eau, une protection chimique et mécanique des racines contre les bactéries, l'élaboration de substances de croissance, l'amélioration de l'alimentation en minéraux et du sol (humus). Pour ces raisons, il est recommandé lors d'un prélèvement ou d'un rempotage de conserver et réintégrer une part du substrat d'origine afin de faciliter la reconstitution de cette flore mycorhizienne. Parmi les espèces dont le mycélium peut entrer en symbiose avec les racines du hêtre et peut aussi participer à la biodégradation des éléments morts (feuilles au moins), on trouve celles de champignons connus : des bolets, des lactaires, des amanites, des girolles, des cortinaires, des hébélomes. Certains traitements sylvicoles (coupes rases, fortes éclaircies) peut aussi négativement affecter les densités de mycorhization.

Concernant l'eau : la hêtraie joue un rôle significatif dans le cycle de l'eau. Vis-à-vis de l'eau, le hêtre a deux exigences majeures :

  • Une atmosphère à hygrométrie plutôt élevée, avec des précipitations annuelles supérieures à 750 mm bien réparties tout au long de l'année ou avec des brouillards fréquents ; Plus on descend vers le sud dans son aire de répartition, plus on le trouve en altitude où il peut grimper à plus de 2 000 m.
  • Un sol bien drainé, mais épargné par les sécheresses[48]. C'est une espèce mésoxérophile à mésophile qui ne résiste pas à l'excès d'eau. Les mesures faites durant la canicule de 2003 montrent que la hêtraie présente aussi une « forte sensibilité des hêtres à la sécheresse édaphique se traduisant par une importante diminution des flux hydriques. » et ont « aussi permis de quantifier la participation des réserves d’eau contenue dans la partie aérienne des arbres (troncs, branches et feuilles). En conditions hydriques non limitantes, cette participation est en moyenne de 16 % de la transpiration journalière. Cette quantité d’eau prélevée dans les tissus des arbres montre une forte variabilité temporelle, dépendant de la demande climatique et donc de la quantité d’eau transpirée. Au cours de la sécheresse, la participation des réserves d’eau à la transpiration a fortement augmenté, tant en quantité, qu’en proportion de la transpiration journalière, la valeur maximale atteinte étant de 67 % ». En cas de sécheresse, la régulation stomatique limite l'évapotranspiration et le bois d'aubier joue un certain rôle de réservoir-tampon d'eau, comme, mais moindrement - les tissus élastiques du tronc.

Répartition (chorologie)

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De belles hêtraies couvrent les collines de la Hesse dans le nord de l'Allemagne.

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Les hêtraies et les hêtraies-sapinières des monts du Cantal, en Auvergne, occupent une bande d'altitude située sous les prairies d'estive des sommets.

 12048C'est dans les montagnes du nord de la Sicile, ici près du sommet des monts Nébrodes, que le Hêtre commun se trouve le plus au sud de son aire naturelle.

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En Aubrac, les hêtres s'installent sous le couvert des pins sylvestres.

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Hêtraie dans les Pyrénées ariégeoises.

L'aire naturelle du Hêtre commun s'étend sur la plus grande partie de l'Europe.

On trouve le hêtre au nord jusque dans les parties méridionales de la Suède. Les peuplements naturels les plus nordiques seraient ceux situés près de Bergen, en Norvège.

Au sud, ses stations les plus extrêmes se trouvent sur les pentes de l'Etna en Sicile. Il est également présent en Corse. Il est absent à l'état spontané de la plaine du Pô et de la plaine hongroise.

Au sud-ouest il atteint en Espagne la Galice et s'est naturalisé dans le nord du Portugal.

Au nord-ouest, on considère généralement, même si la question est discutée, qu'il est aussi indigène dans le sud de l'Angleterre. Par contre il n'est pas spontanément présent ni en Irlande, ni en Écosse.

Au sud-est, il occupe quelques rares stations en Anatolie (Turquie asiatique) sur le Mont Ida de Troade et près de la ville de Simav. Il cède surtout la place au hêtre d'Orient (Fagus orientalis). Des formes intermédiaires entre les deux espèces, considérées comme des hybrides d'intergradation : Fagus × taurica et Fagus × moesiaca sont signalées dès les Balkans. Si l'on considère néanmoins le hêtre d'Orient comme une simple sous-espèce (Fagus sylvatica subsp. Orientalis) ou même une variation du Hêtre commun, alors l'aire se poursuit jusque dans le Caucase et le nord de l'Iran.

Enfin au nord-est, il est présent jusque dans la région russe de Kaliningrad et pénètre aussi en Ukraine au niveau des Carpates. Une aire isolée existe dans les montagnes de Crimée.

Les hêtraies couvrent environ 14 millions d'hectares de forêts en Europe. Le hêtre fait partie des essences dominantes de plusieurs pays européens : il constitue environ 9 % des forêts autrichiennes, 10 % des forêts françaises (3e essence feuillue après le chêne pédonculé et le chêne sessile), 14 % des forêts allemandes ou 19 % des forêts suisses. C'est un arbre de plaine et de basse à moyenne montagne.

En France, le hêtre est représenté, plus ou moins abondamment, sur l'ensemble du territoire métropolitain, sauf dans la plaine du Bassin aquitain et dans les plaines et collines des zones méditerranéennes. Les plus belles hêtraies de plaine sont celles des forêts domaniales de Picardie et de Haute-Normandie : forêts de Crécy ou de Compiègne, forêts d'Eu, de Lyons ou d'Eawy. Le hêtre est aussi une essence commune des collines de Lorraine, de Bourgogne et de Franche-Comté. Près de Nancy se trouve ainsi la vaste forêt de Haye à couvert de hêtre majoritaire. Dans toutes les montagnes françaises, le hêtre est présent et partage l'espace forestier avec les essences résineuses : épicéa, sapin ou pins. En région méditerranéenne, on ne trouve le hêtre qu'en altitude dans l'arrière-pays, où il peut former des peuplements relictuels comme en forêt de la Sainte-Baume.

Le hêtre constitue aussi un marqueur important du paysage rural traditionnel du pays de Caux en Normandie où les clos-masures étaient entourés, pour 50 % d'entre eux environ, de hêtres.

En Belgique et au Luxembourg, le hêtre constitue une composante majeure des paysages forestiers ardennais. La forêt de Soignes, « poumon vert » de l'agglomération bruxelloise, est aussi essentiellement une hêtraie.

L'espèce est évaluée comme non préoccupante aux échelons mondiaux, européen et français.

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Date de dernière mise à jour : 18/12/2025

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